Texte improvisé sur "Don’t leave me now" de Supertramp.
C'est un audio fait à l’arrache en une seule prise (et oui, parfois, je m’autorise, je me lâche la grappe, rien n’est parfait et c’est sans doute mieux comme ça), pour l'entendre, c'est sur mon profil Facebook, ou mon profil Instagram.
Grosse pensée pour Laura Schlichter, parce que tu sais, et même si tu sais pas, t’es toujours un peu là avec moi.
Elle est en voiture. Elle vient de quitter Couteron (elle pense Cucuron, mais ça, c’était un autre moment, encore un texte qu’elle aurait dû écrire et qui ne s’est pas écrit ou qui s’est écrit sans qu’elle ose le partager, parce que c’est toujours compliqué de s’accueillir en entier).
Elle a mis la radio, pas les infos, ça elle peut pas. RFM ou un truc du genre (je sais les gars, y’en a qui connaissent pas. La meuf, c’est une daronne. Elle a un gosse et des ch’veux blancs, qui sont sortis bien avant).
Elle se sent bien, c’est assez rare pour le signaler. Elle a posé, sans faire gaffe, un léger sourire sur son visage. Peut-être que je suis la seule à voir, parce que je suis assez près. La musique démarre. L’introduction prend son temps. Au début, c’est doux. Si doux ce saxo-là. Elle a l’impression d’entendre une flûte mais c’est peut-être autre chose. Elle ne reconnait pas la chanson tout de suite. Les notes du synthé et de l’orgue arrivent et là… Là, c’est parti. Quelque chose se passe. Quelque chose qu’elle n’explique pas (ça vous a déjà fait ça j’en suis sûre). Ça la transperce. Ça la fracture littéralement. C’est venu comme un truc qu’on n’attend pas. Même si cette musique, elle la connait par cœur ou presque. En tout cas, ça faisait des lustres qu’elle l’avait pas entendu. La batterie et la guitare éclatent. Et ça éclate en elle. En écho. En torrent. Un torrent violent comme une colère latente qui aurait couvée trop longtemps sous la peau. Elle ne s’identifie pas à ce qui se dit, aux paroles. Elle, elle ne veut retenir personne. Elle veut plutôt quitter. Quitter. Elle n’a presque plus peur de prononcer ce mot.
Elle est prête à quitter des parts d’elle-même et tout ce qui ne lui convient pas.
Beaucoup de choses se mélangent dans sa tête. Elle revoit la cassette de Breakfast in America de son père, ça la ramène des années en arrière, quand elle vivait chez papa/maman et n’était pas encore indépendante. Tiens, ça lui fait bizarre d’écrire ça, « pas indépendante », parce qu’aujourd’hui elle sent quelque chose qui la ramène à ça. Elle sait qu’il faudra qu’elle soit patiente. Patiente et douce. Qu’il faudra faire de la place. Pour accueillir la suite. Qu’il faudra croire qu’un avenir radieux est devant.
Chaque jour elle met des trucs dans ses oreilles pour se convaincre du bon, du chaud, de la lumière. De tout ce qu’elle n’a pas connu et qu’elle doit aller récupérer à la hache ou en creusant au fond d’elle-même. Elle ne sait pas si elle y arrive. Si elle va réussir. Mais je peux vous dire qu’elle essaie. Oh oui bon Dieu, elle essaie si fort. Elle se dit que tout le monde mérite, que tout le monde a droit au bonheur (même si elle a longtemps été convaincue du contraire, comme si elle était le vilain petit canard ou qu’elle avait tiré le mauvais numéro). Evidemment qu’elle mérite. Evidemment qu’on mérite tous un petit coin tranquille pour pousser, pour espérer se réaliser. Et puis, aujourd’hui, 21.12, les anges sont là. Peut-être que ce « Don’t leave me now », c’est à elle qu’elle se l’était adressée ce jour-là. Pour qu’elle ne se laisse pas tomber. Qu’elle y croit plus fort que tout, cette fois. Parce que sa vie en dépend. Et tout ce qui est à venir. Bon, sinon, au départ, elle devait juste écrire un texte sur la métalepse.
@charlotte_montreynaud
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