Platys Gialos, 1980

Platys Gialos, 1980
Charlotte Mont-Reynaud, Platys Gialos, Mykonos 1978

vendredi 2 septembre 2022

Texte inédit de Pierre Ducrozet


Il est des textes qui foudroie…
Depuis hier, je ne m’en remets pas.

Texte intégral de Pierre Ducrozet.
« Je ne sais pas comment tu t’appelles, je ne sais pas qui tu es. Je sais simplement que je veux danser encore avec toi, que tu es mon moteur et celui de mes personnages que tu fais courir dans la nuit. J’ai cru t’avoir perdu. Parfois. J’ai appris à me passer de toi. Mais tu reviens. Toujours. Et l’on nage dès lors encore mieux d’avoir un jour coulé. Et tout reprend. Je te cherche à nouveau derrière chaque regard, chaque instant, toi que je n’atteindrai pas, que je continuerai malgré tout à traquer. Constamment se glisse entre toi et moi mille choses, les murs du réel, les nœuds du cerveau, la platitude, le vide… Mais quand surgissent ces quelques notes. Là, j’arrive enfin à t’atteindre. Je te prends la main. On pense que les mots nous éloignent des choses qu’ils désignent or c’est précisément le contraire. On pense que nos corps nous empêchent or ils sont nos véhicules. On pense que les chansons ne sont que des sons qui traversent l’air or elles ouvrent des lignes directes entre nos cœurs et le monde. Elles nous élèvent, nous inventent, nous foudroient. Je ne sais pas si tu t’appelles intensité, ardeur, amour, littérature ou bien musique. Tous ces synonymes. Si tu es enfin la coïncidence avec les choses. Mais, quand ce moment surgit, il n’y a plus d’interférence. Je suis directement là. Et c’est pour ça que j’écris. Je crois. Pour enfin faire corps avec toi. Le temps s’ouvre comme une mangue. Et je suis dedans. Tu accélères et tu augmentes, tu densifies, tu élargis et tu creuses, tu dupliques le temps et ouvres l’espace. Tu es plus vraie que ce que l’on appelle communément la vérité. C’est toi qui nous fais avancer et continuera à battre après notre mort dans d’autres corps que les nôtres. Et finalement, clairement je n’aurais fait que cela. Te chercher. Trouver une manière de t’accueillir en moi. Te donner une chambre à toi. Entre les creux et les hauteurs. Entre les meubles sans éclat. Entre le sternum et le cou. Te prendre dans mes bras. Je ne sais pas comment tu t’appelles. Feu. Grâce. Elan. Mais je sais que je t’attends. »

Texte inédit de Pierre Ducrozet, lu par lui-même, dans l'émission #Totémic de Rebecca Manzoni le 01/09/2022, accompagnée par la musique de Max Richter (The Departure) choisie par ses soins.
Dans mes oreilles, en boucle…

Emission à écouter en podcast : Pierre Ducrozet et ses "Variations de Paul" (radiofrance.fr)

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